Histoire de la Robotique Militaire
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Antérieurement engins maladroits et hasardeux, les robots militaires se sont incroyablement perfectionnés au cours de notre histoire récente. Ils sont désormais devenus des soutiens tactiques et opérationnels décisifs dans les conflits armés !
Comment la robotique militaire est-elle arrivée à ce développement exceptionnel ? Quelles ont été les innovations les plus stupéfiantes ? A quoi doit-on s’attendre dans les décennies à venir ? Est-ce que les « robots tueurs » vont prochainement supplanter l’action humaine dans les conflits armés ?
Retrouve les réponses à toutes ces questions dans l'article que l’équipe d’Allure Militaire t’a préparé !
1) Évolution des Robots Militaires
1.1) Quelques Prototypes Précurseurs
Avant le 20e siècle, déjà nombreux étaient les inventeurs s’étant essayés à la robotisation à des fins guerrières. Et ceci avec plus ou moins de succès.
Parmi les nombreuses tentatives, évoquons celle de Léonard de Vinci avec son chevalier mécanique. Le célèbre inventeur l’aurait conçu à la fin du 15e siècle ! Bien que ce chevalier fût loin d’être apte pour les combats, il était tout de même capable de s’assoir, de se lever et de bouger sa tête et ses bras. Tout cela était réalisé grâce à une série d'engrenages et de poulies ⚙️. Un prototype a été produit en 2002 par Mark Rosheim, à partir du carnet de croquis 📓 découvert dans les années 50 appartenant au génie italien !
Plus proche de nous, l’inventeur de Nikola Tesla présenta en 1898 au Madison Square Garden de New York le premier véhicule maritime télécommandé sans fil ! Sa création avait, selon lui, le potentiel pour devenir une arme de guerre révolutionnaire bouleversant les rapports de force entre les grandes puissances militaires. Mais visiblement, son invention était trop avant-gardiste car le représentant du gouvernement assistant à la démonstration lui ria au nez 🤭 ! Celui-ci argumenta que de telles armes ne pouvaient être utiles, ni même viables.
Cette réaction négative ne découragea pas Tesla qui poursuivit ses recherches ! Quelques temps après cette tentative, il proposa à l’Armée américaine un projet de torpilles radioguidées. Cette proposition ne trouva cependant pas plus de succès !
1.2) Les Robots Militaires dans la Première Guerre Mondiale
Les essais infructueux de Nikola Tesla ont cependant inspiré bon nombre d’ingénieurs lors de la Première Guerre Mondiale !
Ces engins sont, pour la plupart, restés à l’état de prototype car ils n’ont pu être opérationnels avant la fin de la guerre !
Ces inventions furent, à la fois, destinées à un emploi terrestre, aérien et maritime.
A propos des robots terrestres, ceux-ci avaient pour objectif d’offrir un avantage dans les Guerres de Tranchées ! Mentionnons, par exemple, le « chien électrique », qui était un chariot de ravitaillement à trois roues conçu pour suivre la lampe de son contrôleur. Plus meurtrier était la torpille terrestre, un tracteur blindé destiné à transporter près de 500 kg d'explosifs dans les tranchées ennemies ! 💥
Dans les airs maintenant. La Première Guerre Mondiale vit l’apparition du premier prototype de drone (que le peut voir ci-dessus !). Ce petit avion 🛩️, nommé le Kettering Bug, utilisait un altimètre, un compteur mécanique et un gyroscope préréglé pour suivre une trajectoire puis s'écraser sur une cible. Mais la guerre s'est terminée avant qu'il ne puisse être utilisé au combat.
Enfin, sur les mers ! Le FL-boat utilisé par la Marine de l’Empire Allemand fût finalement le seul type robot véritablement déployé lors de la Grande Guerre ! Très semblable au prototype de Nikola Tesla, il s’agissait d’un bateau à moteur 🛥️, télécommandé dans un premier temps. Portant à son bord près de 150 kg d’explosifs, le bateau avait pour but de détruire le navire ennemi en déclenchant l’explosion suite à l’impact.
Deux méthodes étaient utilisées pour le manœuvrer : soit rester à terre et espérer que le bateau ennemi se rapproche assez des côtes ; soit le télécommander depuis un hydravion. Les deux méthodes se sont cependant révélées peu pratiques. Si bien qu'en 1916, les Allemands ont mis en service un système de radiocommande sans fil. L’un des plus grands exploits de cette invention fût d’avoir endommagé le HMS Erebus qui naviguait au large des côtes de la Belgique.
1.3) Les Robots Militaires dans la Seconde Guerre Mondiale
Les avancées dans la robotique militaire se perfectionnèrent à l’issue de la Grande Guerre. Plus ou moins proches des premiers prototypes, les robots de la Seconde Guerre Mondiale furent cette fois-ci exploités par les Forces armées à une échelle bien plus grande.
C’est surtout la robotique terrestre et la robotique aérienne qui se développèrent.
Au plan terrestre, les plus fameux robots militaires furent le Goliath et le Télétank !
Le Goliath était une petite machine motorisée et chenillée inventée par l’Allemagne Nazi. Contrôlé à partir d’un système de filoguidage, il comportait un réceptacle où étaient placés près de 50 kg d’explosifs. De la taille d’un petit kart, le Goliath était propulsé au début par des moteurs électriques et plus tard par des moteurs à essence de 12,5 chevaux. Les Allemands ont construit quelque 7 000 de ces robots tueurs ! 😲 : ils les ont utilisés sur le front de l'Est, en Normandie et pendant l'insurrection de Varsovie. Son efficacité était toutefois limitée par sa faible vitesse et sa vulnérabilité aux tirs d'armes légères.
Le Télétank était un char d’assaut radioguidé utilisé par les Forces Soviétiques ! Conçu à partir de chars légers T-26, le robot était capable d’être contrôlé à plus d’un kilomètre de distance ! Outre le contrôle de la mobilité, les opérateurs étaient capables d’activer ses puissants armements (mitrailleuses et lance-flammes notamment). Cette innovation constitua un avantage tactique et opérationnel certain ! Ses capacités d’intervention étaient inédites, jusqu'à ce qu'il soit hors de portée radio, évidemment ... 😓
Au plan aérien, les avancées technologiques ont aussi été particulièrement impressionnantes, avec le « Dennymite », le V-1 et le V-2 !
Le « Dennymite » était un avion radiocommandé conçu par un amateur de maquettes d’avions, Reginald Denny ! Ce dernier, ancien pilote de chasse lors de la Première Guerre Mondiale, proposa à l’Armée américaine son projet de robot aérien à la fin des années 30. Son envergure était de 3,7 mètres et était propulsé par un moteur de 6 chevaux. Les Forces américaines lui achetèrent quelques exemplaires en 1940. Après l’attaque de Pearl Harbor, Reginald Denny croula sous les commandes 💰 : l’armée lui acheta 15 000 exemplaires supplémentaires, faisant du Dennymite le premier avion sans pilote produit en série de l'histoire.
Le « V-1 » et le « V-2 », élaborés par les allemands, sont respectivement le premier de missile de croisière et le premier missile balistique. Mais ces engins n’étaient pas les seuls missiles à fonctionner grâce aux progrès de la robotique. Le Fx 1400 Fritz X notamment était une bombe planante de 1 400 kg avec une ogive de 350 kg, dotée de quatre petites ailes et un d’un moteur-fusée. Les Allemands larguaient l'appareil à haute altitude ☁️ à partir d'un bombardier, puis le dirigeraient par liaison radio à l'aide d'un joystick.
Crédits photo : Public Domain / Wikimedia Commons
1.4) Les Robots Tactiques dans la Deuxième Moitié du 20e Siècle
Durant la seconde moitié du 20ème siècle, c’est avant tout dans le domaine aérien que les progrès en robotique militaire sont apparus. Prototype après prototype, les robots aériens se sont progressivement perfectionnés, pour finalement, à la fin du 20e siècle, se rapprocher de nos actuels drones extrêmement efficaces.
Quels ont été les moments décisifs dans cette évolution ?
Le Ryan Model 147 Lighting Bug fabriqué en 1962 est certainement l’un des modèles ayant influencé le plus les recherches dans la robotique militaire ! Il s’agissait d’un drone militaire à réaction lancé depuis un avion dont les missions pouvaient être d’une grande variété (prise de photo, leurre, brouillage de radar et largage de propagande). Il fût utilisé de nombreuses fois lors de la Guerre du Vietnam, cependant, comme de nombreuses missions au cours de ce conflit, la plupart des interventions furent classifiées. 🤐
Le Lockheed MGM-105 Aquila, produit à partir de 1979, était un petit drone conçu spécifiquement dans le but de survoler les champs de bataille et renvoyer des informations sur le nombre d'ennemis et leurs intentions. L’Aquila (l’aigle 🦅 en italien) n’est toutefois pas associé à des souvenirs très positifs pour l’Armée américaine. Non pas en raison d’erreurs dans sa conception, mais parce que des ajouts de fonctionnalités furent régulièrement apportées de sorte que ces caractéristiques originelles devinrent inaptes à supporter les sophistications successives. En 1987, le programme qui prévoyait à l'origine un budget de 560 millions de dollars pour 780 drones Aquila avait dépensé plus d'un milliard de dollars pour quelques prototypes seulement. Finalement, la production d'Aquila s’arrêta ! 😕
Mais l’innovation technologique décisive dans l’évolution de la robotique militaire aérienne réside dans l’intégration du système de positionnement par satellites (GPS) ! 🛰️ : les opérateurs militaires pouvaient désormais envoyer des drones équipés de GPS partout dans le monde et entreprendre des missions de reconnaissance et de ciblage avec une extrême précision. De nouveaux systèmes tels que le General Atomics RQ-1 Predator et le Northrop Grumman RQ-4 Global Hawk ont fait leur apparition lors des opérations aériennes de l'OTAN, recueillant des informations d’une qualité inédite ! 📡
2) La Situation Actuelle de la Robotique Militaire
2.1) État des lieux
Au début du 21e siècle, la technologie avait atteint sa maturité, devenant chaque année plus efficace et plus facile à utiliser. Les lourds engins maladroits et sans aucune indépendance avaient laissé la place à des robots de plus en plus autonomes et d’une efficacité inédite.
La démonstration de leur utilité s’est clairement établie sur les théâtres d’opération des Forces américaines en Afghanistan en 2001, puis, en Irak en 2003. À chaque vie sauvée et à chaque nouvelle utilisation trouvée des robots tactiques, leur acceptation et leur demande auprès des Forces armées augmentaient 👍. En effet, les combattants américains en Afghanistan étaient tellement satisfaits des prototypes du PackBot tactique - utilisé pour localiser et éliminer les engins explosifs improvisés - qu'ils ont refusé de les rendre à la fin de l'essai sur le terrain en 2001 !
Depuis les attaques terroristes de 2001 aux États-Unis, les sommes consacrées aux robots terrestres ont à peu près doublé chaque année, tandis que celles consacrées aux systèmes aériens ont augmenté d'environ 23 % par an !
L'inventaire militaire américain comprend maintenant plus de 12 000 robots terrestres et 7 000 drones 😮. Le robot de la science-fiction est donc maintenant un élément bien réel de la guerre, qui se répand dans le monde entier, et pas seulement aux Etats-Unis (44 autres pays utilisent à grande échelle la robotique dans la sphère militaire).
Nous allons à présent voir les modèles récents les plus spectaculaires, aussi bien sur terre, sur les mers que dans les airs !
2.2) Récentes Innovations dans la Robotique Militaire
Innovations dans la Robotique Terrestre
Parmi les nombreuses innovations, on peut mentionner le Guardian XO et Fedor.
Le Guardian XO est un exosquelette motorisé décuplant les capacités physiques de l’utilisateur humain qui l’utilise. Ses essais auprès de l’Armée de Terre des Etats-Unis ont été véritablement concluants ! Le Commandement des Opérations Spéciales a donc demandé à l’entreprise créatrice (Sarcos Robotics) de lui en livrer quelques dizaines d’exemplaires pour soutenir les forces terrestres. Accompagné du Robot SMET, récemment testé par la 101st Airborne Division, la fatigue liée aux transports d'équipements militaires pourrait bien n'être plus qu'un désagréable souvenir.
Comme les gars de la 101e Airborne, tu es prêt à sauter sur les belles occasions qui se présentent à toi ? Alors passe faire un tour sur notre store ! Tu pourras retrouver cette ravissante casquette à l'effigie de la troupe d'élite en matière d'assaut aérien !
Fedor est un robot militaire terrestre humanoïde dotée d’une relative autonomie. Il peut aussi reproduire les mouvements d’un opérateur à distance. Même si l’on retrouve sur Internet de nombreuses vidéos avec Fedor tirant avec une mitrailleuse, il est en réalité davantage utilisé pour les sauvetages et les interventions de réparation dans les environnements dangereux. Par exemple, ce robot humanoïde était sensé remplacé les astronautes 👨🚀 pour les réparations de satellites 🛰️. Le dernier essai en date s’est révélé cependant assez infructueux !
Innovations dans la Robotique Maritime
Ici, l’une des plus grandes inventions est sans conteste le Sea Hunter. Les interventions militaires maritimes sont dangereuses et extrêmement coûteuses. Pour limiter les coûts financiers et en vie humaine, l’agence américaine DARPA a mis au point un navire autonome destiné à la lutte anti-sous-marine.
Crédits photo : US Navy / Public Domain / Wikimedia Commons
Au-delà de la mise à l'abri du personnel, le Sea Hunter n'a donc pas besoin de quartiers de couchage ni de salles de bain non plus. Le Sea Hunter peut ainsi être beaucoup plus petits et fonctionner beaucoup plus longtemps !
Une fois que la technologie sera validée, elle pourra être utilisée pour tout type de navire naval, et deviendra un atout décisif au sein de la flotte américaine. Non seulement cela augmentera la force militaire d'un pays 💪, mais cela pourra aussi permettre de réaliser des économies 💵 : le ministère américain de la défense estime qu'il ne coûtera finalement que 15 000 à 20 000 dollars par jour pour faire fonctionner des navires comme le Sea Hunter, alors qu'en comparaison, il en coûte actuellement 700 000 dollars pour faire fonctionner un destroyer traditionnel !
Innovations dans la Robotique Aérienne
L’utilisation la plus notable de la robotique militaire demeure, encore aujourd’hui, pour des applications aériennes. Les drones ne cessent de se perfectionner et de se diversifier !
Les Perdix sont les nouveaux drones de l’Armée américaine. Ils sont peut-être moins impressionnants que leurs homologues, mais ils constituent de véritables bijoux technologiques ! Les drones Perdix sont déployés en grand nombre et communiquent automatiquement entre eux pour prendre des décisions 💬. Relativement aux autres drones, ils sont peu coûteux à fabriquer. Et, pourtant, ils fournissent des données en temps réel plus riches et plus complètes sur le champ de bataille ! Principalement drones de surveillance, ils peuvent aussi être utilisés dans les conflits armés pour brouiller les communications ennemies ou servir de réseau de communication.
Le Black Hornet 🐝, fabriqué par une société norvégienne, est encore plus petite que la Perdrix. Il s’agit d’un drone de la taille d’un colibri ! Son objectif est de fournir des informations instantanées sur des actions se déroulant dans un environnement hostile mais proche du lieu de l’opérateur.
3) L’Avenir des Robots de Guerre
Dans une étude récente de l’Université Harvard, des chercheurs ont utilisé le terme « d’explosion cambrienne » pour décrire les progrès que connait actuellement la robotique militaire.
L’explosion cambrienne est une expression faisant référence à une période éloignée (il y a environ un demi-milliard d’années) où la vie animale et végétale s’est complexifiée et diversifiée extrêmement rapidement. Nombreuses sont les espèces n’ayant pas survécu à l’issue de cette période. Mais les autres ont évolué et se sont adaptées pour survivre.
Ainsi, selon ces chercheurs, la robotique militaire est exactement à ce stade de développement ! Les robots particulièrement sophistiqués aux applications spécifiques sont en train de se développer. Ils vont du canon sentinelle à des drones miniaturisés se déplaçant en forme d’essaims. Et dans quelques années, des robots humanoïdes 🤖 dotés de puissants systèmes d’armes et capables de marcher, de courir, de sauter et d'utiliser leurs mains avec la même dextérité qu’un être humain seront opérationnels.
Le perfectionnement de la mécanique robotique 🦾 associé à des programmes d’actions basés sur l'intelligence artificielle 🧠, tel le récent robot MIDARS, ouvre la voie vers une nouvelle ère de prolifération de technologies aux applications redoutables ! Et le terme d’arme autonome devient de plus en plus approprié.
Mais de nouvelles questions éthiques épineuses apparaissent. Certes, le comportement du robot peut être préprogrammé, et s’auto-perfectionner grâce à ses expériences. Cependant, les règles pour ouvrir le feu, par exemple, peuvent s'avérer très complexes dans la réalité de la guerre. Il s'agit essentiellement d'une question de jugement, difficilement programmable. Éthiquement, ces limites (indépassables ?) des robots tueurs exigent, quels que soient leurs avantages opérationnels, que leurs actions demeurent rigoureusement encadrées par l’intervention humaine.